Perrine Belluteau
Pourquoi en pleine nature ?
Les recherches s’intéressent de plus en plus aux bienfaits de la nature sur notre santé physique, psychique et mentale.

Article « De quelles preuves scientifiques disposons-nous concernant les effets des forêts et des arbres sur la santé et le bien-être humains ? Santé Publique, 1, 219-240.
Disponible en intégralité ici : https://doi.org/10.3917/spub.190.0219
Au niveau physique, par exemple :
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La lumière naturelle agit sur les mécanismes qui commandent de nombreux processus métaboliques (réparation de l’ADN, action anti-oxydante et régulation de la prolifération et de la différenciation cellulaire) ;
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Améliorer le statut de la vitamine D chez le jeune enfant diminue le risque vis-à-vis de nombreuses pathologies auto-immunes (sclérose en plaques, diabète de type I et polyarthrite-rhumatoïde) ;
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L’effet protecteur du temps passé en plein air vis-à-vis du risque d’apparition d’une myopie a été solidement établi et étayé.
Du côté de la santé mentale, on évoque par exemple :
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Que les preuves les plus convaincantes et solides concernent les troubles mentaux et particulièrement la dépression et l’anxiété. Les interventions thérapeutiques par la nature (ITN) conduisent à leur diminution significative.
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Les études laissent penser que les interventions thérapeutiques par la nature (ITN) aboutissent à un bien-être psychologique plus élevé, des niveaux de stress plus faibles, une plus grande aptitude à faire face et une meilleure qualité de sommeil.
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Des études rigoureuses montrent également qu’elles sont efficaces à la fois sur le plan de la santé mais aussi de la réintégration dans le monde du travail.
Pour les personnes âgées, les ITN favorisent l’état de santé général, la qualité de vie, les capacités physiques (et particulièrement la motricité globale), l’aptitude cognitive, les aptitudes linguistiques, la socialisation et les fonctions des activités de la vie quotidienne.
Elles semblent abaisser les taux d’hormones du stress et diminuer les symptômes de la dépression.
Pour des personnes démentes, les ITN, en déclenchant leurs émotions et faisant en sorte de les impliquer et de les faire entrer en contact avec la nature, permettent d’atteindre un niveau d’identité de soi plus élevé et une meilleure santé émotionnelle.
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Article « Santé mentale et bien-être : l’apport des arbres et des forêts au bénéfice de différentes populations en Grande-Bretagne », Santé Publique, vol. 1, no. HS1, 2019, pp. 163-171.
Disponible en version intégrale ici : https://doi.org/10.3917/spub.190.0163
La plupart des études menées qui traitent du temps passé dans la nature attestent des effets positifs vis-à-vis du stress physiologique (Haluza et al., 2014), de la colère, de la fatigue, de la tristesse et de l’attention, de même que des niveaux d’émotions négatives moins élevées (Bowler et al., 2010 ; Thomson, Coon et al., 2011 ; Mc Mahan et Estes, 2015).
Des enfants atteints de déficits d’attention avec hyperactivité se concentrent mieux dans la forêt que dans les sites urbains (Van der Berg, 2011).
Une thèse universitaire explore les résultats obtenus par une initiative relative aux personnes atteintes de démence précoce (moins de 65 ans) dans une forêt urbaine pilote. Programme mis en œuvre en 2014. Il a été montré que l’environnement forestier offrait une « panoplie de ressources et était source de stimulations » (Cook, 2015) permettant aux participants d’être actifs et leur donnant un sentiment de valeur personnelle et de bien-être mental.
La théorie de la restauration-récupération de l’attention de Kaplan (1992) met en évidence 4 éléments clés identifiés :
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L’éloignement des problèmes de la vie de tous les jours ;
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La fascination, par exemple la façon dont la nature peut capter l’attention sans générer d’effort ;
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La compatibilité avec les besoins et les souhaits des personnes ;
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L’étendue, l’envergure de l’immersion dans la nature.
Les auteurs décrivent comme une possibilité de s’échapper du quotidien, permettant parfois de réfléchir et de mettre les soucis en perspective.
La nature permet de se libérer des frustrations, ce qui génère un sentiment de liberté ; une sensation de décuplement des sens les renfant sensibles aux changements de saisons, aux bruits et aux paysages.
Article « La spiritualité et la connexion à la nature comme dimensions du processus thérapeutique dans le champ de la santé mentale : le point de vue de l’éco psychologie clinique comme voie complémentaire. Hegel, 2, 130-138. »
Disponible en version intégrale ici : https://doi.org/10.3917/heg.122.0130
Les travaux d’Ulrich, en lien avec les effets du stress sur la santé mentale montrent qu’une exposition à un environnement naturel améliore la capacité à faire face au stress ressenti et permet de se remettre plus rapidement d’une maladie ou d’une blessure.
Ces données suggèrent que les milieux naturels suscitent une réponse activant le système nerveux parasympathique associé à la restauration de l’énergie physique.
Park et ses collaborateurs ont montré qu’une forme de thérapie naturelle (Shinrin-Yoku) dans laquelle les individus passent du temps dans une forêt en pleine immersion ont montré des réductions de la fatigue mentale grâce à une diminution de l’activité du cortex préfrontal, des concentrations réduites de cortisol et une augmentation des sentiments de confort et de calme.
Hartig et ses collaborateurs ont constaté que la fatigue mentale était le plus efficacement soulagée par une promenade dans un parc. Le contact avec la nature a un impact positif sur la pression artérielle, le cholestérol, les perspectives de vie et la réduction du stress.
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Article « Pourquoi la nature nous fait-elle du bien ? », Rhizome, vol. 82, no. 1, 2022, pp. 13-14.
Disponible en version intégrale ici : https://doi.org/10.3917/rhiz.082.0013
Le contact avec des environnements naturels soutient les fonctions cognitives en réduisant la fatigue et en restaurant la capacité d’attention.
L’exposition à la nature contribue à améliorer le sommeil, tandis que la diminution de l’anxiété et des ruminations négatives apportent une amélioration de l’humeur et des sentiments positifs.
Passer du temps pendant l’enfance permet de développer l’imagination, la créativité, le sens critique et la capacité à résoudre des problèmes.
Une plus grande proximité et accessibilité aux espaces verts quotidiens favorise les interactions sociales et la cohésion.
Chez les enfants, les expériences en extérieur favorisent la motivation pour apprendre, l’enthousiasme, ainsi que le calme, la maîtrise de soi et les compétences relationnelles.
Selon l’hypothèse de la Biophilie d’E. Wilson (1984), différentes régions cérébrales interagissent davantage quand nous sommes entourés de nature, notamment le cortex visuel, qui apparaît particulièrement efficace pour analyser les scènes naturelles. Cette adaptation expliquerait en partie la diminution du stress provoqué par le contact avec la nature tandis que les environnements urbains ont tendance à entraver ce processus de récupération.
Dès 1981, Roger Ulrich, avait montré la présence d’ondes Alpha, caractéristiques d’un état de relaxation lorsqu’on contemple un paysage naturel plutôt qu’un environnement urbain. Ainsi, la nature sollicite nos systèmes neuronaux en douceur, sans les surcharger.
La fascination douce, discrète et continue, offerte par les paysages naturels favorise un repos psychique sans effort et détourne notre attention de nos ruminations.
Des travaux mettent en évidence les effets de certains Phytoncides, des composants chimiques produits par les plantes : l’inhalation de Cédrol par exemple diminue la fréquence cardiaque et réduit la pression artérielle ; l’a-pinène produit par les conifères favorise quant à lui la relaxation et certaines molécules favorisent l’activité des cellules Natural Killer (NK) chez l’humain qui traquent et tuent les cellules infectées par les virus.
Enfin, la mobilisation physique et sensorielle, qu’il s’agisse de marcher, de respirer, d’observer le paysage ou d’écouter des sons permet aux individus de recentrer leur attention sur la présence de leurs corps dans l’espace, offre un chemin à l’esprit pour canaliser les pensées et favorise un état d’attention au moment présent.
Cette disponibilité permet à l’individu de prendre du recul et favorise des moments d’introspection.
Article « D’une conception de l’Existence à une thérapie grandeur nature »
Disponible en version intégrale ici : Gassin.XP (sfg-gestalt.com)
Le désir d’aller mieux, de s’engager dans l’existence doit pouvoir s’appuyer sur le plaisir et l’envie de se déployer dans le monde : un corps en mouvement dans un espace ouvert, riche d’explorations, d’apprentissage… une émotion qui en découle, fondée sur le contact organisme/environnement, une rationalité mise à contribution pour résoudre les difficultés que la « réalité concrète » propose à notre sagacité.
Ouvrir un espace de mouvement, laisser couler le trop plein de violence fondamental dans un canal qui réveille le plaisir de vivre, dans un cadre largement ouvert, tolérant les maladresses sans encourager le passage à l’acte ou la fuite dans du non-sens.
La marche ramène à la disponibilité intérieure, rythme régulier, silence, possibilité de se centrer sur un objectif à atteindre sans urgence particulière, mise en ordre de l’excitation interne canalisée dans un mouvement simple, un peu comme un auto-bercement qui calme et génère sa propre dynamique.
Bercement debout qui nous fait avancer en nous immergeant dans les formes du monde, nourrissant l’organisme de stimulations visuelles, auditives, olfactives, tactiles, kinesthésiques, ...
La marche donne un sens : on avance, on se déplace vers un futur, on met de la distance entre soi et le passé que l’on quitte : un pas de plus, le passé immédiat reste sur place. L’espace parcouru ne nous rattrape pas.
La marche offre un minimum de mobilisation pour que le corps fonctionne mieux : métabolisme amélioré par l’apport d’oxygène, l’exercice musculaire, la circulation sanguine, la respiration.
Elle nous enseigne également sur la manière dont nos affectent nous occupent : nous marchons d’un pas pressé lorsqu’une tension nous habite ; nous trainons avec nonchalance lorsque nous sommes détendus.
La marche nous éveille au plaisir de la découverte. Nous sommes des enfants partis à la recherche de trésors merveilleux
Si nous avions désappris le jeu, la marche peut réanimer notre mémoire ludique.